INTERVIEW AVEC LA DIRECTRICE
DU LYCEE IBN ROCHD
(Publiée dans Le N° 2 de ROCHD-INFOS)
Mme NADIA CHALGHOUMI
Interview réalisée par
Bochra Zwaoui & Wajdi ben Salem (4ème Math)
Cette nouvelle année scolaire a connu l’arrivée d’une nouvelle directrice à la tête du lycée Ibn Rochd de Menzel Bourguiba. Notre magazine Rochd-Infos, dans son souci continuel de vous tenir informés de tout ce qui touche cet établissement, est allé interviewer Madame Nadia Chalgoumi pour vous la faire mieux connaître. Deux de nos éminents journalistes spécialisés dans les entrevues journalistiques se sont donc rendus un jour à son bureau, et les voilà avec elle.
BOCHRA : Nous souhaitons la bienvenue à madame Nadia Chalghoumi, la directrice du lycée Ibn Rochd, dans cette entrevue journalistique. Veuillez Madame nous permettre de vous poser quelques questions qui seront centrées surtout autour de votre vie professionnelle.
WAJDI : Pouvez – vous, Mme la directrice, nous donner tout d’abord une idée sur votre parcours professionnel avant le directorat ?
BOCHRA : Dans quelles circonstances, Mme la directrice, avez-vous pris la décision de renoncer au professorat pour embrasser la carrière de directrice ?
D’abord, j’ai des réserves à émettre sur le terme « renoncer » puisque je crois que je suis principalement une éducatrice, et en tant que directrice, cette tâche, celle de l’éducation, m’incombe davantage. Et il se peut que ce soit là l’une des raisons qui m’ont encouragée à postuler le poste de directrice.
WAJDI : Après cette courte période passée à la tête de cet établissement scolaire, pouvez-vous nous donner votre impression sur la fonction de directeur et ses charges ? ( les obligations de directrice sont-elles par exemple du genre supportable ou du genre trop accablant ?)
Tous ceux qui travaillent dans une institution scolaire ont des responsabilités plus ou moins difficiles, celles de la directrice sont certainement plus considérables. Mais, malgré la lourdeur de ces obligations, je ne les trouve pas si pesantes et exténuantes car je suis convaincue du travail que je fais, que je considère d’ailleurs comme un devoir, sans compter mon attachement au travail en général et mon désir de voir mon pays développé.
BOCHRA : Est-ce que vos engagements envers le lycée se limitent au temps réglementaire du travail et aux jours ouvrables ou bien les dépassent-ils aux jours fériés aussi ?
Mes engagements vis-à-vis du lycée ne se limitent pas aux horaires de travail. En effet, les problèmes rencontrés dans l’exercice de mes fonctions m’occupent tout le temps l’esprit et m’obsèdent jour et nuit, comme on dit.
WAJDI : Après un mois et demi passés à Ibn Rochd, pouvez-vous nous renseigner sur les insuffisances que vous avez constatées dans cet établissement (sur tous les plans : conduite et discipline des élèves, équipements et installations, etc…) ?
Les défectuosités sont nombreuses, à commencer par l’architecture du lycée : Ce bâtiment, par exemple, qui divise la cour en deux et rend moins faciles beaucoup de tâches à faire, et cette autre construction, vétuste et menaçant de s’effondrer à tout moment. Il ya aussi la mentalité des élèves dont la majorité ne se pose pas sérieusement une question que je trouve fondamentale et qui est : « Comment devrais-je agir, en tant qu’élève, et quel est mon devoir envers la Tunisie ? »
BOCHRA : Comment, Madame la directrice, envisagez-vous de remédier à ces failles ?
Il y a des problèmes qui ne sont pas résolvables à court terme telle que l’architecture du lycée. Quant aux élèves, je pense qu’ils ont un bon fond, et qu’ils sont tous issus de bonnes familles, alors la tâche de la rectification de certaines de leurs inconduites n’est pas impossible, mais elle nécessite quelque temps. La preuve est l’entière disposition de plusieurs d’entre eux à coopérer avec moi pour le bien du lycée, quoique certains de ces bénévoles aient déjà subi des sanctions de ma part personnellement !
WAJDI : Considérez-vous votre tâche, Madame, comme trop difficile, ou comme abordable ? Et pourquoi ?
Je ne crois pas à l’impossible, je crois au travail sérieux et continu, et le temps est le garant des bons résultats.
BOCHRA : Quels sont les grands principes, que vous adoptez et desquels vous partez, pour la bonne gestion du lycée et la résolution de ses problèmes, et dans l’exercice de votre métier en général?
J’ai un seul principe : Ma conviction est que l’intérêt du pays est au-dessus de tout intérêt personnel.
WAJDI : A partir de votre expérience professionnelle comme professeur puis directrice, pouvez-vous nous donner votre avis sur les genres de problèmes dont souffrent nos élèves et notre jeunesse en général ces dernières années ? Et quelles solutions proposez-vous à ces problèmes ?
Nos jeunes se laissent entraîner par une imitation aveugle, et suppriment presque leur raison, et c’est ça le vrai danger. En effet, les problèmes dont souffrent notre jeunesse ne sont en majorité, à mon sens, que des illusions car celui qui met en œuvre son cerveau comme il faut, ne s’égare jamais, même s’il doit affronter des difficultés dont il finira, tôt ou tard, par avoir le dessus.
BOCHRA : Etes-vous optimiste ou pessimiste en ce qui concerne le niveau scolaire et la conduite de nos élèves dans les quelques prochaines années à venir ? Et sur quel fondement repose votre optimisme ou pessimisme ?
J’essaye, de ma position, de faire prendre conscience aux élèves de la nécessité de se cultiver eux-mêmes, et du besoin de réfléchir sur tout ce qu’ils apprennent afin de se forger des points de vue solides qu’ils adopteront et défendront. N’empêche, et je ne le cache pas, que j’ai des craintes à ce sujet-là concernant l’avenir de la Tunisie.
WAJDI : Permettez-moi enfin, Madame, cette question un peu personnelle : Parvenez-vous à concilier travail et vie privée ? Etes-vous arrivée à séparer les deux ou est-ce que les préoccupations vous rejoignent jusqu’à la maison ?
Ces préoccupations m’accompagnent à la maison, mais ce n’est pas si encombrant comme le penseraient certains.
BOCHRA : A la fin nous vous remercions Madame pour votre patience et votre franchise et nous vous prions de bien vouloir adresser un petit mot aux lecteurs de notre magazine ROCHD-INFOS, qui sont essentiellement les élèves du lycée Ibn Rochd.
J’appelle les lecteurs de ce magazine, et à travers eux tous nos élèves, à essayer d’abord de se cultiver, puis à réfléchir avant d’adopter un point de vue quelconque, et par conséquent à renoncer à toute imitation quoi que ce soit le nom du modèle imité, car il est impératif d’être soi-même. Et là, je veux expliquer que l’étymon du verbe « se cultiver » en arabe signifie : rectifier, redresser ce qui est tordu (en se basant sur les connaissances acquises à partir des lectures personnelles et des contacts avec les autres). La personne cultivée n’est pas celle qui s’est bourré le crâne d’informations qu’elle répète tout le temps tel un perroquet !
WAJDI : Nous voilà arrivés au terme de notre entrevue. On a été ravi de vous interviewer Madame la directrice. Nous vous remercions infiniment et nous vous souhaitons bonne chance dans l’exercice
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